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Renaître de ses cendres une pousse à la fois
Un article d’Audrey-Maude Vézina
Les feux de forêt ont ravagé l’Australie depuis septembre. Un été extrêmement sec et des chaleurs records ont devancé et aggravé la saison des feux de brousse. Les autorités ont déjà maîtrisé de nombreux incendies. Alors que plusieurs constatent l’ampleur des dégâts, d’autres se tournent déjà vers l’avenir. Qu’arrivera-t-il aux forêts australiennes après une telle catastrophe?
La mort de nombreux animaux dans les flammes a suscité l’attention du public. Des plans de récupération pour la faune et les espèces vulnérables se mettent en branle. Or, sans arbres ni arbustes, l’habitat sera déficient en matière de protection et de nourriture.
Des forêts adaptées aux flammes
Certaines zones boisées sont déjà adaptées aux feux, comme les forêts d’eucalyptus. L’arbre indigène contient une huile hautement inflammable, mais il rejette des graines sous l’action des flammes. Le sol cendreux et riche en nutriments favorise la croissance d’une nouvelle cohorte. « Plusieurs arbres vont revenir assez rapidement. Or, le succès de ces régénérations naturelles va dépendre de la disponibilité de l’eau. Si c’est trop sec dans les années suivant les feux, ça peut retarder ou bloquer la régénération », rapporte Alison Munson, professeure au département des sciences du bois et de la forêt à l’Université Laval.
Cette année, les feux ont touché des forêts habituellement épargnées. « Il y a des habitats plus humides près des rivières et des fleuves qui brûlent moins durant la saison des feux. Or, cette fois, ils ont brûlé aussi puisque tout était tellement sec. Cela implique une régénération plus critique. »
La restauration de l’habitat végétal ne suppose pas nécessairement que la forêt reviendra comme avant. « Avec l’augmentation de la fréquence des sécheresses et feux prévue pour l’Australie, les forêts auront tendance à se modifier, en réduisant leur canopée par exemple. Ce serait un habitat différent de la forêt actuelle. »
Planter la diversité
Parmi les méthodes de régénération, la plantation d’arbres est une bonne option. Mais encore faut-il choisir les bonnes essences. « Certaines espèces toutes seules sont très inflammables, alors si on ne plante que celles-là, ce n’est pas une bonne idée. Au Canada, les espèces de feuillus comme le bouleau ou le tremble sont moins inflammables. On considère donc qu’un mélange de feuillus et de conifères aidera à protéger la forêt boréale des feux. »
Selon Alison Munson, les prochaines années vont guider la planification à long terme pour l’avenir des forêts. « Il faut garder en tête que les forêts sont différentes selon leur localisation et attendre de voir comment les différents types vont réagir. J’ai l’intention d’aller en Australie pour voir la suite des choses. »
Ce serait étonnant qu’un feu de la même sévérité se produise dans les prochaines années. « Il y aura moins de matière à brûler par rapport à cette année. Et pour brûler sévèrement, ça prend beaucoup d’arbres et de feuillage. Ce sera aussi plus difficile pour le feu de s’étendre sur de grandes superficies, car les forêts seront moins bien connectées, » explique Alison Munson. Même si le climat se réchauffe et les sécheresses augmentent, les forêts auront un moment de répit pour reprendre leur force.
Audrey-Maude Vézina est détentrice d’un baccalauréat en physique de l’Université Laval. Elle avait « plus envie de parler de recherche que de la faire », alors elle s’est réorientée en journalisme scientifique. Elle est lauréate de la bourse Fernand-Séguin 2018. Elle a contribué au site web du magazine parisien La Recherche. Ses thèmes de prédilection sont l’environnement et la biodiversité.
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